Frères, examinez avec soin vos demeures intérieures, ouvrez les yeux et considérez votre capital d’amour, et puis augmentez la somme que vous aurez découverte en vous-mêmes.
Veillez sur ce trésor afin d’être riches intérieurement.
On dit chers les biens qui ont un grand prix et avec raison.
Mais quoi de plus cher que l’amour, mes frères ?
A votre avis, quel en est le prix ?
Et comment le payer ?
Le prix d’une terre, celui du blé, c’est ton argent ; le prix d’une perle, c’est ton or ; mais le prix de ton amour, c’est toi-même.
Si tu veux acheter un champ, un bijou, une bête, tu cherches les fonds nécessaires, tu regardes autour de toi.
Mais si tu désires posséder l’amour, ne cherche que par toi-même, c’est toi-même qu’il faut trouver.
Que crains-tu en te donnant ?
De te perdre ?
Au contraire c’est refusant de te donner que tu te perds.
L’Amour lui-même s’exprime par la bouche de la Sagesse et apaise d’un mot le désarroi où te jetait cette parole : « Donne-toi toi-même ! »
Si quelqu’un voulait te vendre un terrain, il te dirait : « Donne-moi ton argent » ou pour autre chose : « Donne-moi ta monnaie. »
Écoute ce que te dit l’Amour, par la bouche de la Sagesse : « Mon enfant, donne-moi ton cœur » (Pr 23,26).
Ton cœur était mal quand il était à toi, quand il était en toi ; tu étais la proie de futilités, voire de passions mauvaises.
Saint Augustin (354-430)
Sermon 34, sur le Ps 149